- Anne-Elisabeth (née et morte en 1662)
- Marie-Anne (née et morte en 1664)
- Marie-Thérèse (1667-1672), la « Petite Madame »
- Philippe (1668-1671) duc d’Anjou
- Louis-François (1672-1672) duc d’Anjou
Chaque décès de l’un de ses enfants est un déchirement pour Marie-Thérèse qui ne trouve du réconfort que dans la religion. Elle voit dans la mort de ses enfants un signe du ciel et se soumet, priant pour les âmes de ses petits anges. Dans ces moments-là, Louis XIV joint ses larmes à celles de la reine avant de retrouver sa maîtresse. La jeune reine ne comprend pas comment son mari peut lui préférer une autre femme. Elle a été élevée dans l’idée qu’elle était le parti le plus prestigieux d’Europe, a eu de nombreux prétendants et a été le gage de la paix entre la France et l’Espagne. Dans l’esprit de Marie-Thérèse, il est inconcevable que Louis XIV puisse être attiré par d’autres femmes, issue de la noblesse de cour. Le 17 septembre 1665, le roi d’Espagne, Philippe IV, décède à l’âge de 60 ans, laissant le trône à un enfant chétif, Charles II, âgé de 4 ans. Anne d’Autriche, minée par un cancer du sein, ne tarde pas à suivre son frère dans la tombe : la reine mère meurt le 20 janvier 1666, laissant Marie-Thérèse privé de son principal soutien à la cour. Même si la disparition d’Anne d’Autriche afflige énormément la jeune reine, elle lui permet d’occuper seule la première place auprès du roi : en effet, jusqu’à sa mort, la mère de Louis XIV est considérée comme la véritable reine de France bien que Marie-Thérèse ait désormais la préséance sur elle. Mais respectueuse et reconnaissante, la reine s’efface volontaire au profit de sa tante et si, dans les cérémonies officielles, Marie-Thérèse occupe la première place, elle s’incline en coulisse face à Anne d’Autriche si bien que les courtisans continuent à s’adresser à la reine mère et non à l’épouse de Louis XIV pour leurs requêtes. Avec la mort d’Anne d’Autriche, Marie-Thérèse devient la seule souveraine du royaume. En 1667, la guerre de « Dévolution » éclate entre la France et l’Espagne : en effet, Louis XIV revendique des territoires espagnols car la dot de Marie-Thérèse n’a pas été réglée. Or, sa renonciation à ses droits sur l’héritage de son père, n’était valide que si la dot était intégralement versée ! De plus, l’Espagne possède des territoires dans le Brabant et, selon le « droit de dévolution », seuls les enfants nés du premier mariage peuvent en hériter : Marie-Thérèse est donc, légalement, la seule héritière de ses territoires
ce que conteste, naturellement, la mère de son demi-frère, le petit Charles II. Dans cette guerre contre son pays natal, Marie-Thérèse approuve Louis XIV, obéissant ainsi à la promesse faite à son père lors de son mariage : se consacrer entièrement à sa place de reine de France, quitte à oublier qu’elle fut infante d’Espagne. Le traité d’Aix-la-Chapelle met fin au conflit, célébrant la puissance de Louis XIV qui y gagne une douzaine de villes flamandes. Si la reine est fière des conquêtes faites en son nom, elle ignore encore que le roi a fait de la marquise de Montespan, sa dame d’honneur, sa nouvelle maîtresse. Bientôt elle doit partager jusqu’à son propre carrosse avec Mlle de La Vallière, favorite officielle, et Athénaïs de Montespan, nouvelle conquête de Louis XIV qui va régner sur son cœur durant près de douze ans. A ses maîtresses, le roi fait des enfants qui sont d’abord tenus à l’écart de la cour et élevés dans l’ombre. Vient ensuite le temps de leur légitimation, ce qui ne choque pas Marie-Thérèse : en Espagne, celle-ci a été habitué à ce que les souverains, à l’exemple de son père, aient des bâtards. Ce qui la perturbe davantage, c’est que Louis XIV partage son amour entre sa famille légitime et celle qu’il forme avec ses enfants naturels et leurs mères.
Louis XIV, Marie-Thérèse et le dauphin (Anonyme)
A la cour, un grand nombre de courtisans reproche à Marie-Thérèse de ne pas participer activement à la distribution des grâces et des faveurs royales. C’est un rôle qu’elle laisse volontiers à son époux mais qui la fait passer pour une souveraine faible et totalement soumise, n’osant aller contre la volonté de son mari. Or, la reine s’est fait entendre plusieurs fois lorsque Louis XIV avait un avis contraire au sien : quand en 1670 la cousine du roi, la Grande Mademoiselle, demande la permission d’épouser le duc de Lauzun, Marie-Thérèse s’interpose alors que le roi allait donner son consentement. La fille de Philippe IV tient a ce que l’image de la famille royale ne se pas entaché par un mariage entre une princesse et un gentilhomme, qui fera rire toute l’Europe. Dans cette affaire, elle n’hésite pas à s’entourer de nobles et de princes opposés à l’union que souhaite la Grande Mademoiselle, affichant clairement sa désapprobation. Face à tant d’opposition et sans le soutien de son épouse, Louis XIV plie. En 1673, la reine lutte également pour conserver auprès d’elle l’une des dames de sa suite espagnole : alors que Louis XIV décide du renvoi de toutes celles qui ont accompagnées Marie-Thérèse en France, celle-ci ose demander à la marquise de Montespan de l’aider à ce qu’une certaine Felipa Abarca demeure à la cour (celle-ci est l’épouse d’un français mais également la demi-sœur bâtarde de la reine). Il ne faut pas voir le geste de Marie-Thérèse comme rabaissant pour elle. Si la reine cherche l’appui de la favorite contre Louis XIV, c’est parce qu’elle sait que sa cause est juste. Devant son épouse et sa maîtresse, le roi cède une nouvelle fois. Ces exemples nous montrent que Marie-Thérèse respecte généralement les décisions du roi en bonne épouse ; mais qu’elle sait également s’opposer et rassembler autour d’elle des appuis de taille lorsqu’elle considère que le roi prend une décision injuste ou indigne de leurs royales personnes. Après que Louis XIV ait renoncé à la marquise de Montespan, la reine se rapproche de celle-ci qui est devenue surintendante de sa maison. Marie-Thérèse espère profiter davantage de son époux mais ce dernier passe de plus en plus de temps avec Mme de Maintenon, ancienne gouvernante des enfants naturels du roi et de Mme de Montespan, dont Marie-Thérèse se méfie. Lorsque Louis XIV revient vers elle, la reine n’est dupe qu’à moitié : influencé par Mme de Maintenon, le roi se montre plus attentionné avec elle mais ne lui accorde pas davantage de sentiments qu’autrefois. Lorsqu’il est question du mariage du dauphin, Marie-Thérèse ne cache pas son souhait qu’il épouse Maria-Antoina de Habsbourg, fille de sa demi-sœur l’impératrice Marguerite-Thérèse. C’est finalement une autre de ses cousines que le dauphin épousera : Marie-Anne-Christine de Bavière. Très vite, la reine devient jalouse de sa belle-fille, jugeant que les festivités données pour son mariage, puis pour la naissance de son fils en 1682, sont moins grandioses que ce que l’on a fait pour elle. Les membres de la cour entourent désormais davantage la dauphine -leur future reine - que Marie-Thérèse et celle-ci admet avec beaucoup de difficultés qu’après ses maîtresses, Louis XIV consacre maintenant beaucoup de temps à sa belle-fille.

Marie-Thérèse d'Autriche (par Jean Nocret)
Le 26 juillet 1683, la reine est incommodée par un abcès sous le bras gauche. Mal soignée, elle décède le 30 juillet à l’âge de 44 ans. La mort soudaine de Marie-Thérèse surprend tout le monde et il est certain que son trépas aurait put être évité, les médecins d'Aquin et Fagon tenant à saigner la reine contre l'avis du chirurgien Gervais. Marie-Thérèse décédera à cause de l'ignorance des médecins qui, aux dires de la Palatine, « ont fait périr la reine comme si ils lui avaient passé l'épée au travers du cœur ». Lorsque l’on prévient Louis XIV de la mort de son épouse, celui-ci répond : « C'est le premier chagrin qu'elle m'ait causé. Le ciel me l'avait donné comme il me la fallait, jamais elle ne m'a dit non. » Il ne faut pas voir ici de l’indifférence ou un détachement de la part du roi face à la mort de Marie-Thérèse car tous les témoins affirment que Louis XIV est affligé de la perte de la reine au point de rester plusieurs jours enfermé dans ses appartements à Versailles. Le 2 août, le cœur de la reine est déposé au Val-de-Grâce tandis que son corps rejoint la crypte de Saint-Denis le 10 août. Née infante d’Espagne, Marie-Thérèse a su devenir tout à fait français et a su se conformer à son rôle principal en donnant un héritier à la couronne. Mais au final, même en se pliant à tout ce que l’on attendait d’elle, la reine a toujours souffert du même mal : ne pas être la favorite ! Son père lui a préféré sa jeune demi-sœur et son époux ses nombreuses maîtresses. Au moment où elle aurait pu s’affirmer et prendre sa place à Versailles, où la cour venait de se fixer, la mort l’en a empêchée.
Pour en savoir plus : "Marie-Thérèse d'Autriche : épouse de Louis XIV" par Jöelle Chevé
