06. Anne-Louise de La Réale
Officiellement, Anne-Louise naît de Marguerite Haynault et d’Antoine-Louis de La Réale, ancien officier de cavalerie. Sous ce dernier nom se cache en réalité Louis XV, qui a ici choisi le patronyme révélateur de « Réal » (qui signifie « royal » en espagnol). La fillette, née le 17 novembre 1762, est donc la sœur cadette d’Agnès-Louise de Montreuil. Élevée elle-aussi au couvent de Chaillot, Anne-Louise reçoit en août 1774 des lettres de reconnaissance de noblesse. Le 28 août 1780, la jeune fille épouse le comte René-Guillaume de Geslin (dit aussi Gelin de la Villeneuve). Un premier fils naît de cette union, en septembre 1781. Il sera suivi de cinq autres enfants.
Au début de la Révolution Française, le comte de Geslin émigre, laissant sa femme et ses enfants en France. Sous la Terreur, Anne-Louise et ses enfants sont arrêtés sur ordre du Comité et incarcérés au château de Saint-Germain-en-Laye. De retour en 1795, René-Guillaume de Geslin est arrêté à la fin de l’année par les révolutionnaires. Accusé d’être lié aux royalistes, le comte est condamné à mort et guillotiné le 27 décembre. Il ne laisse à Anne-Louise qu’une lettre d’adieux : « Suivant toutes les apparences, mes bonnes amies, je ne vous reverrai plus ; une commission militaire est assemblée pour me juger. Cette forme blesse la Constitution, je l’ai observé, mais cette commission me fait annoncer qu’elle va me juger de suite, et la forme ainsi que la célérité qu’on met vous prouvera que mon sort est décidé avant de m’avoir entendu, adieu donc mes dignes amis et mes chers enfants. Mon cœur est aussi tranquille que ma main. Gelin, Loulou, Petit Fils, Fanny, suivez les leçons de votre mère et de votre tante et vous serez surement des hommes vertueux. Je meurs digne de vous, ma mémoire vous sera chère et cette satisfaction adoucit la peine de notre éternelle séparation. Chère Annette [surnom d’Anne-Louise], mille baisers de flame vous sont envoyés en idée de la part d’un homme qui sait apprécier vos vertus et le bonheur dont il a joui auprès de vous.. l’on m’arrache à tout ce que j’aime. Adieu. Geslin ».
Au cours de son emprisonnement, la comtesse perd deux de ses enfants. Libérée à la fin de la Révolution, la comtesse de Geslin se retrouve veuve et ruinée. De ses six enfants, il ne lui reste plus qu’un un fils Edouard-René (1784-1853). Les cinq autres nés de son union « n’avaient pu résister aux privations et aux misères de toute nature de cette terrible époque ». On sait que deux d’entre eux sont morts lors du séjour en prison d’Anne-Louise, à Saint-Germain-en-Laye.
Au retour de Louis XVIII sur le trône, Anne-Louise écrit à son parent afin de lui demander d’intervenir pour son fils, en souvenir de René-Guillaume de Geslin, qui a toujours fait preuve de dévouement envers la couronne. Edouard-René est ainsi nommé lieutenant en octobre 1814, avant de devenir officier de la Légion d’honneur en 1816 et lieutenant-colonel en 1825. En 1820, le roi reçoit Anne-Louise à l’occasion du mariage d’Edouard-René et lui confie : « Nous avons privé votre fils de son père, nous lui en tiendrons lieu », montrant là son désir de s’impliquer dans la vie du nouveau comte de Geslin. Ainsi, Louis XVIII accorde au jeune couple une pension de 4000 livres. Anne-Louise vit alors à Saint-Germain-en-Laye, heureuse de la position de son fils et de son union avec la jeune Marie-Joséphine de Lardemelle, qui lui donnera quatre enfants. Anne-Louise, comtesse de Geslin, s’éteint le 30 avril 1831 à Saint-Germain-en-Laye, l’âge de 68 ans. Elle a toujours des descendants.
Bibliographie
– Louis XV, par Michel Antoine
– Les bâtards de Louis XV et leur descendance, par Joseph Valynseele et Christophe Brun
– Les enfants de Louis XV : descendance illégitime, par Henri Vrignault