Membres de la famille Royale

Marie-Thérèse de France, fille de Louis XVI

Marie-Thérèse Charlotte de France naît à Versailles le 19 décembre 1778. Sa naissance est très attendue puisqu’il s’agit du premier enfant de la reine Marie-Antoinette. Déception : ce n’est pas le dauphin tant souhaité qui vient au monde, mais une fille. Louis XVI ne s’en montre pas contrarié et la jeune mère estime qu’un fils « eût plus particulièrement appartenu à l’Etat » et que sa première-née « ne lui en sera pas moins chère ».  Baptisée le jour même, la princesse reçoit les prénoms de sa grand-mère et marraine, l’Impératrice Marie-Thérèse, et celui de son parrain, le roi Charles III d’Espagne, ainsi que le titre de « Madame Royale ». Logée dans l’aile des Princes, la petite Marie-Thérèse compte plus de vingt personnes à son service. La plus importante d’entre elles est Victoire-Armande de Rohan-Soubise, princesse de Guéméné, gouvernante des enfants de France. Cette charge est dans la famille depuis cinq générations et son arrière arrière grand-mère, la duchesse de Ventadour, a probablement sauvé la vie de Louis XV lorsqu’il avait 2 ans.

Madame Royale, âgée de 10 ans, par Adolf Ulrich Wertmüller
Madame Royale, âgée de 10 ans, par Adolf Ulrich Wertmüller

Lorsqu’elle accouche d’un dauphin, le 22 octobre 1781, Marie-Antoinette annonce à Mme de Guéméné qu’elle « reprend sa fille », ayant rempli son devoir envers la France. La gouvernante sera remplacée en 1782 par la duchesse de Polignac, amie de la reine. Ainsi, la souveraine espère pouvoir prendre en main l’éducation de sa fille. Âgée de 4 ans, Marie-Thérèse se montre déjà fort réfléchie si bien que son oncle, le comte d’Artois, la surnomme  » Mousseline la Sérieuse ».  Malgré le fait que Marie-Antoinette s’intéresse à ses enfants plus que ne l’ont fait les reines de France avant elle, Madame Royale manifeste très vite de l’antipathie pour sa mère. En 1783 alors que la souveraine fait une grave chute de cheval qui aurait pu la tuer, la petite princesse affirme qu’elle en aurait été contente et que, libérée de sa mère, elle aurait pu faire  tout ce qu’elle souhaitait. Il est vrai que Marie-Antoinette apprend très vite à sa fille à partager avec les autres et, comme compagnes de jeux, on lui donne les filles de domestiques ou des petites paysannes que Marie-Thérèse doit respecter. La princesse a parfois du mal à supporter ces contraintes. En grandissant, elle développe un caractère difficile, accompagné d’une fierté que sa mère juge trop excessive.

Marie-Antoinette s’implique toujours dans l’éducation de Madame Royale. Celle-ci est douée pour la lecture, a une excellente mémoire et montre un certain goût pour les arts (dessin, piano). C’est une élève appliquée au grand contentement de ses parents. On songe très vite  à des projets de mariage pour elle :  l’héritier du trône de Suède – futur Gustave IV – ou encore François de Bourbon-Sicile, fils aîné de la reine de Naples Marie-Caroline – sœur préférée de Marie-Antoinette. Mais la reine de France semble privilégier pour sa fille Louis-Antoine de Bourbon, duc d’Angoulême (fils aîné du comte d’Artois), cousin de Madame Royale. De cette façon, Marie-Thérèse n’aurait pas à se séparer de sa famille pour vivre dans une cour étrangère sans amis où certains pourraient lui être hostiles. En 1788, on donne à la princesse une nouvelle compagne de jeu, la petite Marie-Philippine Lambriquet que la reine surnomme Ernestine. Du même âge que Madame Royale, la fillette vient de perdre sa mère qui était femme de chambre de Marie-Thérèse. Certains on voulu voir en elle une fille illégitime de Louis XVI. Son père était en réalité au service du frère du roi, le comte de Provence.

Madame Royale et le dauphin Louis-Joseph, par Elisabeth Vigée-Lebrun (1784)
Madame Royale et le dauphin Louis-Joseph, par Elisabeth Vigée-Lebrun (1784)

 La mort du dauphin Louis-Joseph, en juin 1789, peine énormément Marie-Thérèse. A cette époque, la Révolution est en marche. Madame Royale n’a pas encore 11 ans. Son adolescence ne sera pas pour elle une période d’insouciance et elle grandira dans la tourmente révolutionnaire.  La princesse racontera plus tard dans ses Mémoires l’horreur qu’elle a vécu lors du transfert de la famille royale aux Tuileries, le 7 octobre 1789, et de la tentative de fuite qui échoua à Varennes en juin 1791. Lors de chaque émeute, Marie-Thérèse avait l’impression qu’elle et sa famille allaient être assassinés. Le 13 août, la famille royale est installée au Temple. A cause du peu de vêtements dont elle dispose, Madame Royale apprendra à les raccommoder tous les soirs. Le 20 janvier 1793 Louis XVI est condamné à mort. Les adieux à sa famille, la veille de l’exécution, sont déchirants. Le roi est guillotiné le lendemain à 10h20. Au son des tambours qui annoncent sa mort, Marie-Thérèse pousse des cris tellement perçants que des rumeurs circulent, annonçant que la princesse vient de succomber.  Son petit frère devient Louis XVII mais, en juillet de la même année, les municipaux arrachent l’enfant-roi à sa famille. Le 7 octobre, Madame Royale  – qui n’est plus pour la République que Thérèse Capet – est confrontée à son frère qui a affirmé à son gardien que sa mère et sa tante ont commis l’inceste avec lui. Sa sœur nie toutes les accusations portées contre Marie-Antoinette et Madame Elisabeth. La reine est transférée à la Conciergerie le 2 août 1793. A plusieurs reprises, Marie-Thérèse demandera à être réunie avec sa mère. Elle ignore encore que celle-ci est déjà morte. Au Temple, c’est désormais sa tante, Madame Elisabeth, qui s’occupe d’elle. Elle apprend à la jeune princesse à ne compter que sur elle-même, à faire son lit le matin, à balayer sa chambre, à s’habiller seule et à se contenter du strict nécessaire. Pour entretenir sa santé, Madame Royale marche chaque jour une heure dans sa chambre sur les conseils de sa tante,  afin de faire de l’exercice. Après le départ de Madame Elisabeth le 9 mai 1794, Marie-Thérèse se retrouve seule.

Marie-Thérèse de France, par Heinrich Friedrich Füger (1796)
Marie-Thérèse de France, par Heinrich Friedrich Füger (1796)

Après la mort de Robespierre, en juillet 1794, la princesse reçoit la visite de Barras et les conditions de captivité s’améliorent. On lui apporte du linge et Laurent – gardien de Louis XVII – assure également la surveillance de Madame Royale qui lui reconnaît beaucoup de gentillesse. Après la mort de son frère, le 8 juin 1795, la France songe à échanger la fille de Louis XVI contre des prisonniers républicains retenus en Autriche. En attendant que les pourparlers aboutissent, on donne à  la princesse une jeune femme pour lui tenir compagnie, Mme de Chanterenne que Marie-Thérèse surnommera affectueusement « Rénette ». C’est à elle que revient la lourde tâche d’annoncer à Madame Royale la mort de sa mère, de sa tante et de son frère. Pour tous les français, Marie-Thérèse est « l’orpheline du Temple ». Le 26 décembre 1795, elle passe en Autriche, dans la famille de Marie-Antoinette, où elle restera trois ans. Conformément aux souhaits de sa mère, Madame Royale épouse son cousin, le duc d’Angoulême, le 10 juin 1799. S’en suit un long exil pour les Bourbons.  Marie-Thérèse ne revient en France qu’en 1814, lorsque son oncle  – le comte de Provence – monte sur le trône sous le nom de Louis XVIII. La princesse rappelle à tous les horreurs de la Révolution. Mais à son sujet, des rumeurs commencent à circuler : certains trouve la duchesse d’Angoulême trop différente de Madame Royale. On murmure qu’il y a eu substitution lors de son échange et que la princesse serait cachée en Allemagne sous le nom de la « Comtesse des Ténèbres ». Quand à la duchesse d’Angoulême, il s’agirait de Marie-Philippine Lambriquet, compagne d’enfance de Marie-Thérèse. Avant d’apporter du crédit à ces rumeurs, rappelons-nous que la fille de Louis XVI a vécu l’enfer en prison et que cette tragique période a probablement eu des conséquences sur son caractère.

La duchesse d'Angoulême, par Robert Lefèvre (1824)
La duchesse d’Angoulême, par Robert Lefèvre (1824)

 Avec le retour de Napoléon durant les Cent Jours (en 1815), la famille royale doit de nouveau s’exiler. Marie-Thérèse est la seule qui aurait montré  un peu de résistance face à l’empereur des français, qui dira de la princesse qu’elle est « le seul homme de la famille des Bourbon ». Malgré le fait qu’il existe un profond attachement entre Marie-Thérèse et Louis-Antoine, la duchesse d’Angoulême ne parviendra pas à tomber enceinte. En 1824, Louis XVIII meurt, laissant le trône à son frère, le comte d’Artois, désormais Charles X. La duchesse d’Angoulême devient alors la dernière dauphine de France. En 1820, son beau-frère, le duc de Berry est assassiné, laissant deux enfants dont Marie-Thérèse s’occupera comme une mère après le départ de la leur. En 1830, Charles X doit abdiquer en faveur de son petit-fils, le duc de Bordeaux. Durant quelques minutes – entre la signature du roi et celle du duc d’Angoulême qui renonce lui-aussi au trône – Marie-Thérèse est reine de France, et son époux, l’éphémère Louis XIX. Après la mort de Charles X, en 1836, la duchesse d’Angoulême soutient son neveu le duc de Bordeaux – Henri V pour les légitimistes – espérant qu’il monte un jour sur le trône de ses ancêtres. Veuve en 1844, Marie-Thérèse s’éteint le 19 octobre 1851 d’une pneumonie, chez son neveu, au château de  Frohsdorf en Autriche, âgée de 72 ans. 

Bibliographie :

Madame Royale, par André Castelot
Madame Royale, par Monique de Huertas
Les princes du malheur : le destin tragique des enfants de Louis XVI et de Marie-Antoinette, par Philippe Delorme