Idées de lecture

Mémoires apocryphes de Madame de Prie

Sylvie Binet ressuscite Agnès Berthelot de Pléneuf, marquise de Prie, à travers le récit « Mémoires apocryphes de Madame de Prie », paru en janvier 2020 aux éditions L’Harmattan.

Maîtresse du prince de Condé, duc de Bourbon – cousin de Louis XV – Madame de Prie a été accusée de corruption et de libertinage, pour ensuite tomber dans l’oubli après l’exil de son amant. Elle mourra dans l’indifférence, loin du château de Chantilly qu’elle adorait, à l’âge de 29 ans.

A travers ces mémoires apocryphes, Sylvie Binet veut réhabiliter l’image de Madame de Prie, en nous présentant, non pas la favorite avide de pouvoir, mais une jeune femme victime du système, qui n’a pas su éviter les pièges de ses ennemis, jaloux de ses succès et qui lui reprochent ses origines bourgeoises.

Mariée trop jeune au marquis de Prie, Agnès ne cherche qu’à plaire à ses parents en se comportant en fille – puis en épouse – obéissante. D’une grande beauté, Agnès découvre son pouvoir de séduction lorsque le duc de Bourbon, petit-fils de Louis XIV, s’éprend d’elle. La belle marquise ne cède aux avances du prince que pour plaire à son entourage, et ne pas subir le courroux du duc de Bourbon, homme influent. Sa famille est ruinée, son époux la délaisse. A-t-elle vraiment le choix ? Mais en devenant la maîtresse d’un membre de la famille royale, Agnès ne découvrira que trop tard qu’elle devient, aux yeux du monde, le bouc-émissaire idéal pour expliquer les dépenses de son amant et ses mauvais choix politiques.

A Chantilly, domaine du duc de Bourbon, Agnès de Prie s’épanouit et a à cœur d’embellir les jardins, de distraire son amant en organisant des fêtes où le jeune Louis XV est convié. Si la marquise contribue au rayonnement du château de Chantilly, elle ne prend pas garde aux rumeurs qui circulent à son sujet : ne se mêle-t-elle pas de politique en recevant le roi chez le duc de Bourbon ? Ne cherche-t-elle pas obtenir une promotion pour le prince, en intriguant ?

A la mort du Régent, en 1723, le duc de Bourbon devient premier ministre de Louis XV. Agnès de Prie se retrouve en première ligne et, bien qu’elle n’ait pas reçu une instruction la destinant à faire de la politique, la maîtresse du duc de Bourbon est sollicitée de toute part, et accusée d’avoir trop d’influence sur son amant. C’est sur Agnès que se déversera la haine des nobles comme des paysans, lorsque la France traversera une crise financière, après l’effondrement du « système de Law ».

De sa famille, qui l’avait poussée dans les bras du duc de Bourbon, la jeune femme ne recevra aucun soutien. Trop occupée à embellir Chantilly et à soutenir son amant dans ses fonctions, Agnès ne comprendra que trop tard les mises en garde de ses rares amis…

Au fil des pages, nous découvrons le portait d’une femme touchante, qui dut jouer un rôle auquel elle n’était pas préparée : celui de favorite. S’attirant la jalousie de la noblesse en raison de ses origines bourgeoises, Agnès de Prie a dû évoluer dans un monde qu’elle ne comprenait pas, et où ses ennemis guettaient le moindre de ses faux pas.

Un récit qui met en lumière une personnalité méconnue et, probablement, injustement calomniée.

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