Historia

De Venise à Pékin : Marco Polo agrandit le monde

Pour le 700e anniversaire de la disparition de Marco Polo, le magazine Historia consacre son mensuel au vénitien qui s’est rendu célèbre par son long voyage en Extrême-Orient, qu’il a immortalisé dans son « Livres des merveilles »

L’homme qui a sillonné la Chine durant vingt-quatre années naît à Venise en 1254. La famille Polo compte de nombreux marchands, à l’exemple du père et de l’oncle de Marco, qui s’aventurent outre-mer afin d’y bâtir leur fortune et accroitre leur renommée. En faisant prospérer leur commerce, les Polo peuvent bientôt s’allier à des familles illustres de Venise, grâce à des mariages. Orphelin de mère très tôt, Marco grandit au sein d’un véritable clan familial ambitieux, dont les membres sont aussi bien marins qu’hommes d’affaires : deux qualités indispensables pour réussir loin de chez soi. Durant sa jeunesse, Marco étudie la géographie et commence à se familiariser avec les langues étrangères, un atout pour son futur métier et ses voyages en Asie. Le jeune homme quitte Venise à l’âge de 17 ans, suivant son père et son oncle, autant par curiosité que par devoir, afin de prendre la suite des affaires familiales. Il ne reviendra dans sa ville natale que vingt-quatre années plus tard.

Les Polo peuvent se vanter d’être des marchands internationaux, qui vendent des produits rares et de grande qualité, principalement des tissus de soie et des pierres précieuses. Leurs clients sont des personnes haut placées, souvent des souverains désireux d’avoir les plus belles étoffes et parures. Le long voyage de Marco Polo ne permet pas seulement au jeune homme de commercer : c’est également l’occasion pour le vénitien d’avoir des échanges culturels, linguistiques et religieux dans les nombreux pays asiatiques qu’il traverse : la Perse, la Mongolie et la Chine.

Marco Polo est amené à rencontrer le grand khan (« souverain ») Kubilay (1215-1294), l’empereur des Mongols, qui deviendra également empereur de Chine en 1274. Grâce à son aisance, son intelligence, et les connaissances acquises lors de son périple (maîtrise des langues étrangères…) , le vénitien se voit bientôt gratifié de la charge de « messager de l’empereur », faisant de lui un homme important. Marco Polo dispose ainsi de laissez-passer, de gardes du corps et d’un titre à la cour de son bienfaiteur. 

Marco Polo consigne tout ce qu’il voit au cours de son voyage dans ses carnets, ce qui représente une masse d’informations colossale, personne avant lui n’ayant séjourné aussi longtemps en Chine. A son retour chez lui, en 1295, le vénitien regroupe ses écrits dans un ouvrage intitulé « Le Devisement du monde », plus connu par la suite sous le nom du « Livre des merveilles ». Marco Polo fait ainsi partager ses connaissances des empires Mongols et Chinois, explique les traditions, les coutumes et l’organisation de la cour du khan Kubilay. L’homme qui a eu la confiance de l’empereur décrit les paysages qu’il a découverts, et donne des précisions géographiques parfois inédites : Marco Polo est ainsi le premier européen à évoquer le Japon, pays jusque là inconnu de l’Occident. Une « découverte » qui le fera parfois passer pour un affabulateur par ses détracteurs…

Le livre de Marco Polo apporte tant de nouvelles connaissances sur l’Extrême-Orient qu’il est bientôt traduit dans plusieurs langues et qu’il s’exporte dans toute l’Europe, à la cour des princes curieux des découvertes faites par celui qui n’était qu’un marchand, et qui gagna le titre de « Messire » en se mettant au service de l’empereur Mongol.

Mais bientôt, le livre de Marco Polo fait naître des polémiques, selon lesquelles celui-ci exagère dans son récit sur ce qu’il a pu voir à l’étranger, qu’il invente certains passages tant il donne des détails inédits et tant ce qu’il décrit semble extraordinaire. Compte tenu de la durée de son séjour à la cour de l’empereur, certains se demandent si Marco Polo n’a pas contracté une union là-bas et on murmure qu’il a laissé derrière lui une épouse et des enfants… avant de convoler à nouveau à Venise, en 1300. D’autres vont plus loin, en remettant en cause le voyage jusqu’en Chine de Marco Polo. Une idée soutenue en 1995 par l’historienne anglaise Frances Wood ! A l’inverse, un contemporain du vénitien affirma que, sur son lit de mort, on lui demanda d’avouer les mensonges que contenait son livre… et que celui-ci confessa seulement n’avoir raconté que la moitié de ce qu’il avait réellement vu !

Embarquez avec Marco Polo pour son voyage au bout du monde : une invitation à découvrir les merveilles de l’Extrême-Orient, dont les descriptions fascinent encore sept siècles plus tard.

mensuel N° 925 / Janvier 2024