Historia

La conquête de l’Algérie : ces vérités qui dérangent (1830-1902)

Le magazine Historia revient sur la conquête de l’Algérie, engagée sous la Restauration par Charles X, en 1830, pour redorer l’image de la monarchie. Au château de Versailles, la Galerie des Batailles propose quelques toiles qui témoignent de la violence de cette conquête, qui s’est souvent faite dans le sang et les massacres, au mépris des populations locales.

Les hommes qui sont envoyés en Algérie, pour pacifier et gouverner le pays au nom de la France, sont des militaires, des chefs de guerre respectés  et autoritaires ayant parfois servi dans l’armée impériale, à l’exemple du général Thomas Bugeaud, qui s’est illustré à Austerlitz. Nommé gouverneur de l’Algérie en 1840, il fait régner la terreur dans le pays et son arrivée annonce une vague de massacres, de déportations et la mise en place d’une politique de « la terre brûlée ». Toutes ces atrocités, qualifiées de « nécessités fâcheuses » traduisent l’objectif des français : tuer et détruire pour avancer plus vite.

Devant ces horreurs, certains officiers français témoignent de leur effroi : « On ravage, on pille, on détruit »… Les populations qui résistent sont anéanties sans distinction d’âge ou de sexe. Ceux qui échappent aux massacres sont contraints de s’exiler, refusant la domination de ceux qui font la guerre « d’une manière beaucoup plus barbare que les Arabes eux-mêmes » (Alexis de Tocqueville). Car face à tant de violence, les politiciens, les socialistes et les philosophes commencent à s’indigner de la « stratégie de dévastation de l’Algérie ».

Sur place, à la tête de la résistance contre la colonisation, on trouve l’émir Abd el-Kader qui s’oppose dès 1832 à l’armée française. Celle-ci profitera des oppositions entre les différentes tribus pour conclure des alliances et recruter des autochtones, créant ainsi le corps de zouaves. Revivez les nombreuses révoltes auxquelles se heurtent les français après la prise d’Alger en juin 1830, qui vont se poursuivre durant près de soixante-dix ans, malgré la reddition d’Abd el-Kader en 1847… Parmi les grandes figures de la résistance, on trouvera de nombreux hommes mais aussi une femme, Lalla Fatma N’Soumer, la « Jeanne d’Arc du Djurdjura ».

Pour faire accepter aux algériens la domination de la France, des « bureaux arabes » émergent à compter de 1844, au sein desquels on trouve des notables locaux, qui doivent aider à promouvoir les idées des colonisateurs. Si ces bureaux sont officiellement un « trait d’union » entre les européens et les autochtones, et doivent protéger les populations, certains chefs profitent de leur pouvoir pour multiplier les abus. Découvrez le fonctionnement des  « bureaux arabes » – et leurs déviances – qui disparaîtront dans les années 1870, bien avant la fin de la conquête de l’Algérie.

Au fil du temps et de l’avancement de la colonisation, l’Algérie va devenir une terre de déportation et de bagne où la France envoie des opposants politiques ou des révolutionnaires. Mais pour d’autres, l’Algérie est une terre d’exil à l’exemple des Lorrains et des Alsaciens qui fuient l’occupation allemande après la défaite de Sedan en 1870. Bientôt, des italiens et des espagnols débarqueront en Algérie, pour y travailler et/ou pour y trouver une vie meilleure. Cette situation amènera les français à revoir leur politique et leurs lois, fin de rester majoritaire en Algérie…

Au fur et à mesure de la conquête de l’Algérie, le territoire va se transformer et de nouvelles villes sont sortir de terre tandis que les autochtones sont expulsés et relégués dans des hameaux où les conditions de vie sont difficiles. Revivez, pas à pas, l’émergence de quartiers européens et la construction d’infrastructures qui transforment le paysage : routes, gares, ponts, bâtiments publics (bibliothèques, Palais de justice)… l’Algérie se veut moderne pour attirer les européens et développer le tourisme, en invitant les élites à faire un voyage dans un orient idéalisé ! Derrière la façade de cette terre d’utopies, se cache pourtant une triste réalité pour les populations locales : expropriées, malmenées, leur existence est régit par le Code de l’indigénat, souvent qualifié de « régime du sabre » en raison de sa dureté.

Mais bientôt des anticolonialistes feront entendre leur voix, révoltés du traitement réservé aux « indigènes » par la République Française…

mensuel N°892 / avril 2021